Notre blog

Validité d’un forfait-jours : la taille de l’entreprise ne compte pas !

L’autonomie d’un salarié, à laquelle est conditionnée l’application d’un forfait-jours, ne s’apprécie pas au regard de la taille de l’entreprise.

Si la durée du travail est généralement décomptée sur une base horaire hebdomadaire, certains salariés peuvent être soumis à un forfait annuel en jours. Autrement dit, leur temps de travail s’établit sur la base d’un nombre de jours travaillés dans l’année, moyennant une rémunération fixée forfaitairement. Mais attention, tous les salariés ne sont pas éligibles à ce dispositif. En effet, selon le Code du travail, il s’adresse uniquement :
– aux salariés cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif applicable au sein de l’atelier, du service ou de l’équipe auquel ils sont intégrés ;
– et aux salariés (cadres ou non cadres) dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice des responsabilités qui leur sont confiées.

Concrètement, il convient de se référer, notamment, au poste occupé par le salarié, à l’organisation de son emploi du temps et aux responsabilités qui lui sont confiées pour apprécier son autonomie. Et non pas à la taille de l’entreprise, comme vient de le préciser la Cour de cassation.

Dans cette affaire, une salariée cadre recrutée en tant que vétérinaire et soumise à un forfait-jours avait été licenciée pour inaptitude. Elle avait saisi la justice afin de contester la validité de ce forfait et ainsi obtenir, entre autres, le paiement d’heures supplémentaires. Elle estimait, en effet, ne pas avoir disposé de l’autonomie suffisante dans l’organisation de son emploi du temps pour se voir appliquer un forfait-jours notamment car elle avait été contrainte de se conformer aux horaires d’ouverture et de fermeture du cabinet vétérinaire.

Saisie du litige, la Cour d’appel de Grenoble n’avait pas fait droit à sa demande. Selon les juges, compte tenu de la taille réduite du cabinet (qui comptait seulement la présence d’une assistante vétérinaire ou d’une autre vétérinaire), la salariée n’avait pas été contrainte de se soumettre à un horaire collectif. Il en résultait qu’elle avait, à juste titre, pu se voir appliquer un forfait-jours.

Mais la Cour de cassation n’a pas validé ce raisonnement. Pour elle, l’autonomie de la salariée, et donc la validité du forfait-jours auquel elle était soumise, ne peuvent pas être appréciées en fonction de la taille du cabinet. Il reviendra donc, de nouveau, aux juges d’appel de se positionner sur l’autonomie réelle de la salariée au regard de critères plus pertinents…

Cassation sociale, 25 janvier 2023, n° 21-16825

Article publié le 28 février 2023 – ©  Les Echos Publishing – 2022 – Réf : 519444

Bulletin de paie : des changements à venir

Au 1er juillet 2023, le bulletin de paie des salariés devra mentionner le montant net social.

Depuis plusieurs années, les employeurs doivent, pour la présentation des cotisations et des contributions sociales et des informations relatives au prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, respecter un modèle de bulletin de paie.

Les bulletins de paie édités à compter du 1er juillet 2023 devront intégrer une nouvelle information, à savoir le montant net social. Celui-ci correspond à l’ensemble des sommes brutes liées aux rémunérations et revenus de remplacement des salariés (salaires, primes, avantages en nature, indemnités légales d’activité partielle, indemnités de congés payés…) duquel sont déduites les cotisations et contributions sociales obligatoires.

Précision : le montant net social constitue le montant que les allocataires doivent déclarer pour bénéficier notamment de la prime d’activité ou du RSA. Son inscription sur le bulletin de paie vise à simplifier leurs démarches auprès des organismes sociaux.

Voici donc la présentation du modèle de bulletin de paie qui deviendra obligatoire pour tous les employeurs à compter du 1er juillet 2023 :

Cotisations et contributions socialesBaseTauxPart SalariéPart Employeur
SANTÉ
Sécurité sociale – Maladie Maternité Invalidité Décès
Complémentaire Santé
Complémentaire Incapacité Invalidité Décès

Valeur
Valeur
Valeur

Valeur
Valeur
Valeur

Valeur
Valeur
Valeur

Valeur
Valeur
Valeur
ACCIDENTS DU TRAVAIL – MALADIES PROFESSIONNELLESValeurValeur
RETRAITE
Sécurité sociale plafonnée
Sécurité sociale déplafonnée
Complémentaire Tranche 1
Complémentaire Tranche 2
Supplémentaire

Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
Valeur

Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
Valeur

Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
Valeur

Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
FAMILLEValeurValeur
ASSURANCE CHÔMAGE
Apec (1)
Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
Valeur
AUTRES CONTRIBUTIONS DUES PAR L’EMPLOYEURValeur
COTISATIONS STATUTAIRES OU PRÉVUES PAR LA CONVENTION COLLECTIVEValeurValeur
CSG déductible de l’impôt sur le revenuValeurValeurValeur
CSG/CRDS non déductible de l’impôt sur le revenuValeurValeurValeur
EXONÉRATION ET ALLÈGEMENTS DE COTISATIONSValeurValeur
TOTAL DES COTISATIONS ET CONTRIBUTIONSValeurValeur
NET SOCIALValeur
NET À PAYER AVANT IMPÔT SUR LE REVENUValeur
dont évolution de la rémunération liée à la suppression des cotisations salariales chômage et maladieValeur
IMPÔT SUR LE REVENUBaseTauxMontantCumul annuel
Montant net imposableValeurValeur
Impôt sur le revenu prélevé à la sourceValeurValeurValeurValeur
Montant net des heures compl/suppl exonéréesValeurValeur
NET A PAYER AU SALARIE (en Euros)Valeur
ALLÈGEMENT DE COTISATIONS EMPLOYEUR (en Euros)Valeur
TOTAL VERSÉ PAR L’EMPLOYEUR (en Euros)Valeur
(1) Il n’existe qu’un seul modèle de bulletin de paie pour les cadres et les non-cadres. La ligne relative à la cotisation Apec n’apparaît que sur le bulletin des salariés cadres.

À savoir : l’arrêté du 31 janvier 2023 introduit également un nouveau modèle de bulletin de paie que les employeurs peuvent utiliser dès le 1er juillet 2023 mais qui ne deviendra obligatoire qu’à compter du 1er janvier 2025.

Arrêté du 31 janvier 2023, JO du 7 février

Article publié le 22 février 2023 – ©  Les Echos Publishing – 2022 – Réf : 518524

Pratiquer une activité sportive durant un arrêt maladie n’est pas forcément déloyal

L’exercice par un salarié d’une activité sportive, durant son arrêt maladie, sans aggravation de son état de santé, ne cause pas à son employeur un préjudice justifiant sa révocation du fait d’un manquement à l’obligation de loyauté, peu important le paiement intégral de son salaire.

Cass. soc. 1-2-2023 n° 21-20.526 F-D, Établissement Régie autonome des transports parisiens c/ M.

Un manquement à l’obligation de loyauté suppose un préjudice causé à l’employeur

L’exercice d’une activité pendant un arrêt de travail provoqué par la maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l’obligation de loyauté qui subsiste pendant la durée de cet arrêt (Cass. soc. 4-6-2002 n° 00-40.894 FS-PBR ; Cass. soc. 11-6-2003 n° 02-42.818 F-D). Pour constituer un tel manquement et justifier le licenciement, cette activité doit avoir causé un préjudice à l’employeur ou à l’entreprise (Cass. soc. 12-10-2011 n° 10-16.649 FS-PB ; Cass. soc. 21-11-2018 n° 16-28.513 F-D).

A noter :

Selon la Cour de cassation, le salarié en arrêt maladie ne manque pas à son obligation de loyauté lorsqu’il exerce une activité pour le compte d’une société non concurrente de celle de l’employeur (Cass. soc 26-2-2020 n° 18-10.017 FS-PB ; Cass. soc. 7-12-2022 n° 21-19.132 F-D). En revanche, le bien-fondé du licenciement a été admis en cas d’exécution par le salarié pour son propre compte d’une activité concurrente de celle de son employeur (Cass. soc. 21-10-2003 n° 01-43.943 F-P) et en cas de démarchage des clients de ce dernier au profit de la société de son conjoint (Cass. soc. 23-11-2010 n° 09-67.249 F-D).

Par un arrêt du 1er février 2023, la Cour de cassation répond pour la première fois à notre connaissance à la question de savoir si le préjudice causé à l’employeur peut ou non résulter du paiement intégral du salaire par ce dernier durant l’arrêt maladie. Elle répond aussi à celle de savoir s’il pourrait, le cas échéant, résulter de l’exercice par le salarié d’une activité pendant ses arrêts de travail qui aurait entraîné une aggravation de son état de santé ou prolongé ses arrêts de travail.

En l’espèce, un opérateur de contrôle de la RATP ayant participé à plusieurs compétitions de badminton pendant ses arrêts de travail est révoqué en raison d’un manquement à son obligation de loyauté envers son employeur. Estimant ne pas avoir manqué à cette obligation pendant ses arrêts de travail, il saisit la juridiction prud’homale afin de contester le bien-fondé de sa révocation.

La cour d’appel ayant jugé cette dernière sans cause réelle et sérieuse au motif que la participation régulière du salarié à des compétitions de badminton pendant ses arrêts de travail n’avait causé aucun préjudice à la RATP et ne constituait donc pas un manquement du salarié à son obligation de loyauté, l’employeur s’est pourvu en cassation.

Le préjudice ne peut pas résulter du paiement intégral du salaire pendant l’arrêt maladie …

À l’appui de son pourvoi, l’employeur fait tout d’abord valoir que, lorsqu’il assure par lui-même la couverture des risques maladie, accident du travail et maladie professionnelle de son personnel dans le cadre d’un régime spécial de sécurité sociale, la participation du salarié, pendant un arrêt de travail intégralement rémunéré par l’employeur, à des activités non autorisées et manifestement incompatibles avec l’incapacité de travail à l’origine de son arrêt de travail, constitue un manquement du salarié à son obligation de loyauté. Le préjudice économique et financier en résultant pour l’employeur pourrait ainsi justifier son licenciement.

La Cour de cassation rejette cet argument. Après avoir rappelé les principes énoncés ci-dessus, la Haute Cour précise que le préjudice pour l’employeur ne saurait résulter du seul maintien intégral du salaire, en conséquence de l’arrêt de travail, assumé par l’employeur qui assure lui-même le risque maladie de ses salariés.

A notre avis :

La solution retenue ici par la Cour de cassation semble logique eu égard à celle retenue en cas de versement par l’employeur d’un complément de salaire durant l’arrêt maladie dans le secteur privé et selon laquelle le préjudice causé ne peut pas résulter du seul versement par l’employeur d’un complément de salaire durant l’arrêt maladie (Cass. soc. 26-2-2020 n° 18-10.017 FS-PB et Cass. soc. 7-12-2022 n° 21-19.132 F-D précités).

… mais peut découler de l’aggravation de l’état de santé du salarié du fait de l’activité exercée

L’employeur fait également valoir, à l’appui de son pourvoi en cassation, que l’exercice par le salarié, pendant un arrêt de travail, d’une activité physique manifestement incompatible avec l’incapacité de travail à l’origine de cet arrêt, susceptible d’aggraver son état de santé ou laissant présumer qu’il a en réalité recouvert la santé, constitue un acte de déloyauté du salarié, source d’un préjudice fonctionnel et économique.

La Haute Juridiction n’est pas davantage convaincue par cet argument et approuve la cour d’appel d’avoir jugé la révocation du salarié sans cause réelle et sérieuse. Pour elle, le salarié a participé à 14 compétitions sportives au cours des cinq arrêts de travail qui lui ont été prescrits sur l’année. La cour d’appel, qui a apprécié souverainement cette situation de fait, a considéré qu’il n’était pas démontré que cette participation aurait aggravé son état de santé ou prolongé ses arrêts de travail. Elle en a déduit que le salarié n’avait pas manqué à son obligation de loyauté pendant la durée de l’arrêt de travail. La Cour de cassation, approuvant ce raisonnement, en conclut que le salarié n’avait pas commis la faute grave qui lui était reprochée.

A noter :

Cet arrêt constitue une nouvelle illustration du contrôle exercé par la chambre sociale de la Cour de cassation sur les vérifications opérées par la cour d’appel pour caractériser un manquement à l’obligation de loyauté. Si, dans celui-ci, elle considère que les juges du fond ont bien caractérisé l’absence de préjudice causé à l’employeur en relevant qu’il n’était pas démontré que la participation du salarié à des compétitions de badminton aurait aggravé son état de santé ou prolongé ses arrêts de travail, elle en a jugé autrement dans un précédent arrêt rendu dans une affaire qui opposait déjà la RATP à l’un de ses salariés. Il était alors reproché à ce dernier, victime d’une maladie professionnelle affectant ses deux mains, et dans l’incapacité d’exécuter son travail de mécanicien, d’avoir participé à des courses de rallye. La cour d’appel, considérant que cette activité de loisirs était incompatible avec sa maladie, avait admis la légitimité du licenciement mais la Haute Juridiction avait censuré cette décision, considérant que les juges du fond n’avaient pas recherché si l’activité en cause avait porté préjudice à l’employeur (Cass. soc. 16-10-2013 n° 12-15.638 F-D). On notera que, dans l’arrêt du 1er février 2023, la Cour de cassation semble admettre que si l’employeur avait été en mesure de prouver une aggravation de l’état de santé du salarié en raison de son activité sportive, ou une prolongation de son arrêt de travail en résultant, alors son préjudice aurait été établi, et la rupture du contrat de travail aurait été légitime.

Retrouvez toute l’actualité sociale décryptée et commentée par la rédaction Lefebvre Dalloz dans votre Navis Social.
:

Vous êtes abonné ? Accédez à votre Navis Social à distance

Pas encore abonné ? Nous vous offrons un accès au fonds documentaire Navis Social pendant 10 jours.

Documents et liens associés

Cass. soc. 1-2-2023 n° 21-20.526 F-D, Établissement Régie autonome des transports parisiens c/ M.

Source – Article issu du site © Editions Francis Lefebvre – La Quotidienne

Assurance chômage : une durée d’indemnisation réduite de 25 %

La durée de versement de l’allocation chômage est réduite de 25 % pour les demandeurs d’emploi dont le contrat de travail prend fin à compter du 1er février 2023.

La récente loi dite « marché du travail » a ouvert la possibilité pour le gouvernement de faire varier, en fonction de la conjoncture économique et de la situation du marché du travail, les conditions exigées pour ouvrir droit à l’allocation chômage ainsi que la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi.

Important : le montant de l’allocation chômage, lui, ne peut pas être modulé.

Concrètement, ce système de « contracyclicité » permet au gouvernement de durcir les conditions d’ouverture des droits et/ou de raccourcir la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi lorsque la période est favorable pour l’emploi (taux de chômage inférieur à 9 %). L’objectif ? Inciter les demandeurs d’emploi à retourner sur le marché du travail.

À ce titre, compte tenu du taux de chômage actuel (7,3 % au 3e trimestre 2022), un récent décret réduit la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi de 25 % pour les contrats de travail prenant fin à compter du 1er février 2023. Sachant que cette durée d’indemnisation ne peut pas être inférieure à 6 mois.

À noter : la durée d’indemnisation varie pour chaque demandeur d’emploi. Jusqu’alors, la durée maximale était de 24 mois (30 mois pour les personnes âgées de 53 à 54 ans et 36 mois pour celles d’au moins 55 ans). Diminuée de 25 %, cette durée maximale est donc désormais de 18 mois (23 mois pour les personnes âgées de 53 à 54 ans et 27 mois pour celles d’au moins 55 ans).

En cas de dégradation de la situation du marché du travail, les demandeurs d’emploi affectés par la réduction de leur durée d’indemnisation se verront attribuer un complément de fin de droits annulant la réduction de 25 %. Ce complément sera accordé :
– si le taux de chômage augmente d’au moins 0,8 point sur un trimestre ;
– ou si le taux de chômage remonte à au moins 9 %.

À l’inverse, le complément de fin de droits cessera d’être appliqué lorsque, sur trois trimestres consécutifs :
– le taux de chômage augmentera de moins de 0,8 point ou diminuera et ;
– le taux de chômage passera en dessous de 9 %.

Décret n° 2023-33 du 26 janvier 2023, JO du 27

Article publié le 03 février 2023 – ©  Les Echos Publishing – 2022 – Réf : 515469

L’astreinte peut être requalifiée en temps de travail effectif…

Si les contraintes imposées au salarié durant les périodes d’astreinte ne lui permettent pas de vaquer librement à ses occupations personnelles lorsqu’il n’est pas sollicité, ces périodes peuvent être requalifiées en temps de travail effectif.

Dans le cadre de leur emploi, les salariés peuvent être amenés à effectuer des astreintes. Celles-ci correspondent à des périodes durant lesquelles les salariés, sans être sur leur lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de leur employeur, doivent être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise. Les périodes d’astreinte donnent alors lieu, pour les salariés, à une contrepartie soit sous forme financière, soit sous forme de repos.

Précision : les interventions du salarié pendant une période d’astreinte sont, elles, rémunérées comme du temps de travail effectif.

Mais attention, l’astreinte peut être requalifiée en temps de travail effectif, c’est-à dire en permanence, si les contraintes imposées au salarié sont d’une telle intensité qu’elles ne lui permettent pas de vaquer librement à ses occupations personnelles.

Dans une affaire récente, un dépanneur automobile était soumis à des astreintes, sur des périodes de 15 jours consécutifs, afin de pouvoir intervenir sur une portion d’autoroute. En litige avec son employeur, il avait saisi la justice afin d’obtenir, entre autres, la requalification de ces astreintes en temps de travail effectif.

La Cour d’appel d’Amiens avait rejeté sa demande en retenant, notamment, que les astreintes étaient bien prévues par la convention collective applicable au salarié. Elle avait, en outre, relevé qu’il avait été constitué des équipes de plusieurs dépanneurs, munis d’un téléphone, qui intervenaient à la demande du dispatcheur, lequel, contrairement aux autres salariés, était spécialement affecté à la réception continue des appels d’urgence.

Mais la Cour de cassation, elle, a rappelé que, durant les périodes d’astreinte, le salarié n’est pas à la disposition permanente et immédiate de l’employeur. Et ce, contrairement aux périodes de temps de travail effectif durant lesquelles le salarié est à la disposition de l’employeur, se conforme à ses directives et ne peut vaquer librement à ses occupations personnelles.

Aussi, selon les juges, en cas de litige, il convient d’analyser les conditions dans lesquelles se déroulent les astreintes afin de déterminer si les contraintes imposées au salarié n’affectent pas significativement sa faculté de vaquer à ses occupations personnelles lorsqu’il n’est pas sollicité. Car dans un tel cas, les astreintes constituent, en réalité, des périodes de temps de travail effectif. Or, dans cette affaire, la Cour d’appel n’a pas procédé à une telle analyse alors même que le salarié disposait d’un temps relativement court (30 minutes) pour se rendre sur le lieu de ses interventions.

L’affaire sera donc de nouveau examinée par les juges d’appel.

Cassation sociale, 26 octobre 2022, n° 21-14178

Article publié le  – ©  Les Echos Publishing – 2022 – Réf : 513285

Décision unilatérale d’intéressement : quelles formalités ?

Un récent décret précise les documents que l’employeur doit déposer sur la plate-forme numérique TéléAccords lorsqu’il instaure l’intéressement via une décision unilatérale.

L’intéressement consiste pour les employeurs à verser aux salariés des primes dont le montant dépend des résultats ou des performances de l’entreprise. Ce dispositif facultatif permet de motiver les salariés tout en bénéficiant d’un avantage social puisque les primes d’intéressement sont, sous certaines conditions, exonérées de cotisations sociales.

Si l’intéressement est généralement instauré par un accord collectif, les entreprises de moins de 50 salariés peuvent y recourir via une simple décision unilatérale de l’employeur.

Cette possibilité est néanmoins réservée aux entreprises qui ne sont pas couvertes par un accord de branche agréé prévoyant un dispositif d’intéressement et :
– qui sont dépourvues de comité social et économique (CSE) et de délégué syndical ;
– ou qui disposent d’un CSE ou d’un délégué syndical avec lesquels des négociations sur l’intéressement ont été engagées mais n’ont pas abouti (le CSE devant alors être consulté sur le projet d’intéressement au moins 15 jours avant son dépôt auprès des pouvoirs publics).

De nouveaux justificatifs à produire

L’employeur doit déposer la décision unilatérale mettant en place l’intéressement sur la plate-forme numérique TéléAccords. Il doit également transmettre certains justificatifs dont la liste vient d’être complétée par décret.

Ainsi, désormais, lorsque la décision unilatérale est adoptée dans une entreprise sans CSE ni délégué syndical, l’employeur doit déposer sur cette plate-forme une attestation selon laquelle il n’a été saisi d’aucune désignation de délégué syndical et, pour les entreprises devant mettre en place un CSE (entreprises d’au moins 11 salariés), un procès-verbal de carence datant de moins de 4 ans.

Lorsque la décision unilatérale est adoptée à la suite de l’échec des négociations avec le CSE ou un délégué syndical, l’employeur doit déposer, avec la décision, le procès-verbal de désaccord dans lequel sont consignés en leur dernier état les propositions respectives des parties ainsi que le procès-verbal de consultation du CSE.

À noter : la décision unilatérale mettant en place l’intéressement peut être modifiée par une autre décision unilatérale.Décret n° 2022-1651 du 26 décembre 2022, JO du 27

Article publié le 19 janvier 2023 – ©  Les Echos Publishing – 2022 – Réf : 512445

Recouvrement des cotisations sociales dues par un entrepreneur individuel

Les situations caractérisant une « inobservation grave et répétée » des obligations sociales d’un entrepreneur individuel de nature à autoriser les organismes de recouvrement des cotisations sociales à le poursuivre sur son patrimoine personnel et non pas seulement sur son patrimoine professionnel viennent d’être précisées.

Vous le savez, depuis le 15 mai dernier, les entrepreneurs individuels relèvent d’un nouveau statut juridique qui se caractérise par la séparation de leurs patrimoines personnel et professionnel. Grâce à ce nouveau statut, les biens personnels d’un entrepreneur individuel (donc ceux compris dans son patrimoine personnel, à savoir une résidence, des actifs mobiliers, une voiture…) sont protégés des risques financiers inhérents à son activité puisque seul son patrimoine professionnel, composé des biens qui sont « utiles » à son activité, peut désormais être saisi par ses créanciers professionnels.

Mais attention, cette séparation des patrimoines supporte des exceptions. Ainsi, le recouvrement de l’impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux (CSG et CRDS) dus par un entrepreneur individuel peut être opéré sur ses patrimoines tant professionnel que personnel. De même, lorsqu’un entrepreneur individuel a commis des manœuvres frauduleuses ou des inobservations graves et répétées de ses obligations sociales ayant empêché le recouvrement des cotisations sociales dont il est redevable, les organismes de recouvrement des cotisations et contributions sociales peuvent le poursuivre sur son patrimoine personnel et non pas seulement sur son patrimoine professionnel.

Les situations caractérisant une « inobservation grave et répétée »

À ce titre, les situations caractérisant une « inobservation grave et répétée » des obligations sociales d’un entrepreneur individuel viennent d’être précisées. Il s’agit :
– de l’absence d’acquittement ou de l’acquittement partiel, dès lors que leur montant total excède un seuil prévu par un arrêté (à paraître), des sommes dues au titre d’au moins deux des quatre dernières échéances semestrielles, d’au moins deux des huit dernières échéances trimestrielles ou d’au moins six des vingt-quatre dernières échéances mensuelles de paiement des cotisations et contributions sociales, ou d’au moins quatre échéances de paiement d’un plan d’apurement ou d’un échéancier de paiement des cotisations et contributions sociales restant dues ;
– de l’absence de respect des échéances et des conditions de dépôt d’une déclaration sociale ou de la souscription incomplète ou erronée d’une telle déclaration, n’ayant pas donné lieu à correction ultérieure et ayant donné lieu à l’application de majorations ou pénalités, au titre d’au moins deux déclarations au cours des quatre dernières années incluant l’année en cours, dont le montant total excède un seuil prévu par un arrêté (à paraître) ;
– des manquements à la législation de la Sécurité sociale ayant conduit, à la suite de vérifications ou de contrôles distincts, à la notification, au titre d’au moins deux des cinq années précédant l’année en cours, soit d’observations n’ayant pas donné lieu à redressement, soit de redressements devenus définitifs, pour un montant total qui excède un seuil prévu par un arrêté (à paraître).

Décret n° 2022-1618 du 22 décembre 2022, JO du 24

Article publié le  – ©  Les Echos Publishing – 2022 – Réf : 513035

Contrats en alternance : quelles sont les aides à l’embauche ?

Les pouvoirs publics ont fixé à 6 000 € le montant de l’aide financière qui peut être allouée, en 2023, aux employeurs au titre de la première année d’un contrat d’apprentissage ou de professionnalisation.

Pour favoriser le recours aux contrats en alternance, les pouvoirs publics revisitent régulièrement les aides à l’embauche accordées aux employeurs. Dernières modifications en date : la refonte de l’aide unique à l’apprentissage et le versement d’une aide exceptionnelle pour la première année d’un contrat d’apprentissage ou de professionnalisation. Tour d’horizon des aides mobilisables.

L’aide unique à l’apprentissage

Depuis plusieurs années déjà, les entreprises de moins de 250 salariés bénéficient d’une aide financière, baptisée « aide unique à l’apprentissage », pour les contrats conclus en vue d’obtenir un diplôme ou un titre professionnel équivalant, au plus, au baccalauréat.

Jusqu’alors, cette aide était versée pendant les trois ou quatre années d’exécution du contrat d’apprentissage. Sachant qu’une aide exceptionnelle, de 5 000 ou 8 000 €, était allouée à l’employeur la première année.

Pour les contrats conclus à compter du 1er janvier 2023, l’aide unique à l’apprentissage est versée uniquement au titre de la première année du contrat. Son montant maximal s’élève à 6 000 €.

En pratique : comme auparavant, l’employeur doit, pour bénéficier de l’aide, transmettre le contrat d’apprentissage à son opérateur de compétences (OPCO). Il doit ensuite, chaque mois, renseigner les données relatives au contrat dans la déclaration sociale nominative (DSN). L’aide lui est versée mensuellement par l’Agence de service et de paiement.

Et pour les autres contrats ?

Une aide exceptionnelle est accordée aux employeurs qui signent un contrat d’apprentissage non éligible à l’aide unique à l’apprentissage.

Exemple : sont concernées, notamment, les entreprises de moins de 250 salariés qui concluent un contrat d’apprentissage visant à obtenir un diplôme ou un titre professionnel allant du niveau bac+2 au niveau bac+5.

Cette aide exceptionnelle est aussi allouée aux employeurs qui signent un contrat de professionnalisation avec un jeune de moins de 30 ans en vue d’obtenir :
– un diplôme ou un titre professionnel équivalant, au plus, au niveau bac+5 ;
– un certificat de qualification professionnelle ;
– des compétences définies par l’employeur et l’OPCO, en accord avec le salarié.

L’aide exceptionnelle est versée au titre de la première année du contrat d’apprentissage ou du contrat de professionnalisation. Son montant maximal est fixé à 6 000 €.

Et attention, car l’aide concerne uniquement les contrats conclus entre le 1er janvier et le 31 décembre 2023 !

En pratique : là encore, pour prétendre à l’aide exceptionnelle, l’employeur doit transmettre le contrat d’apprentissage ou de professionnalisation à son OPCO. Il doit ensuite, chaque mois, renseigner les données relatives au contrat dans la DSN. L’aide lui est versée mensuellement par l’Agence de service et de paiement.

Décret n° 2022-1714 du 29 décembre 2022, JO du 30

Article publié le  – ©  Les Echos Publishing – 2022 – Réf : 510268

Travailleurs indépendants : du nouveau en cas d’arrêt de travail

Deux mesures issues de la loi de financement de la Sécurité sociale modifient les conditions d’indemnisation des travailleurs indépendants qui bénéficient d’un arrêt de travail en 2023.

La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023 a provisoirement revu les règles d’indemnisation des arrêts de travail des travailleurs indépendants. Et ce, afin de leur assurer un meilleur niveau de protection sociale.

Des revenus 2020 neutralisés

En principe, les indemnités journalières maladie-maternité allouées aux travailleurs indépendants sont calculées à partir de la moyenne des revenus qu’ils ont perçus au cours des 3 années civiles précédentes.

Toutefois, en raison de la crise sanitaire liée au Covid-19, les pouvoirs publics avaient décidé de neutraliser, pour le calcul des indemnités journalières versées en 2022, le revenu 2020 des travailleurs indépendants. Et ce, dès lors que cela leur était favorable.

Cette mesure est reconduite pour les arrêts de travail (initiaux ou de prolongation) qui débutent entre le 1er janvier et le 31 décembre 2023. Concrètement, les revenus perçus en 2020 par un travailleur indépendant sont pris en compte uniquement si l’indemnité journalière calculée en fonction des années 2020, 2021 et 2022 est supérieure à l’indemnité journalière calculée en fonction des seuls revenus des années 2021 et 2022.

Et en cas de Covid-19 ?

La loi de financement de la Sécurité sociale a reconduit, à compter du 1er janvier 2023 et jusqu’à une date qui sera fixée par décret (au plus tard le 31 décembre 2023), les arrêts de travail liés au Covid-19 dits « dérogatoires ». Autrement dit, les travailleurs indépendants testés positifs au Covid-19 qui ne peuvent pas travailler, y compris à distance, bénéficient du versement des indemnités journalières sans délai de carence ni condition d’affiliation.

Attention : depuis le 1er janvier 2023, ces arrêts de travail dérogatoires ne concernent plus les travailleurs indépendants symptomatiques qui attendent le résultat d’un test (PCR ou antigénique).

Art. 27, loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022, JO du 24 Décret n° 2022-1659 du 26 décembre 2022, JO du 27

Article publié le  – ©  Les Echos Publishing – 2022 – Réf : 510987

Les nouveautés à connaître en matière d’activité partielle

Les entreprises impactées par un délestage électrique qui ne sont pas en mesure d’aménager le temps de travail de leurs salariés peuvent recourir à l’activité partielle.

Les entreprises qui subissent une baisse de leur activité en raison, par exemple, de la conjoncture économique ou de difficultés d’approvisionnement, peuvent recourir à l’activité partielle. Un dispositif qui, pour soutenir financièrement les entreprises durant la crise sanitaire liée au Covid-19 mais aussi en raison de la guerre en Ukraine, est régulièrement adapté. Le point sur les nouveautés à connaître.

À savoir : les entreprises impactées par une baisse durable de leur activité pouvaient demander à bénéficier, jusqu’au 31 décembre 2022, de l’activité partielle de longue durée (APLD). S’il n’est désormais plus possible aujourd’hui d’entrer dans ce dispositif, les autorisations accordées avant le 1er janvier 2023 continuent de s’appliquer.

Un nouveau motif de recours

Les entreprises sont autorisées à recourir à l’activité partielle en cas de circonstances exceptionnelles. C’est le cas, par exemple, lorsque leurs activités sont ralenties ou arrêtées du fait des conséquences économiques de la guerre en Ukraine. Et selon les questions-réponses publiées sur le site internet du ministère du Travail, les employeurs peuvent également bénéficier de ce dispositif dès lors qu’ils sont directement affectés par un délestage électrique et qu’ils ne sont pas en mesure d’aménager le temps de travail de leurs salariés pour faire face à cette situation.

Précision : le dispositif d’activité partielle peut être mobilisé pendant la durée du délestage et, le cas échéant, pendant la durée nécessaire à la remise en marche des unités de production.

Les employeurs concernés doivent effectuer une demande d’activité partielle sur le site activitepartielle.emploi.gouv.fr en sélectionnant le motif « toutes autres circonstances exceptionnelles », puis le sous-motif « délestage ». Et ce, dans les 30 jours qui suivent le placement de leurs salariés en activité partielle.

Des indemnité et allocation ajustées

Les employeurs doivent verser à leurs salariés, pour chaque heure d’activité partielle, une indemnité au moins égale à 60 % de leur rémunération horaire brute (prise en compte dans la limite de 4,5 Smic). Cette indemnité ne peut pas être inférieure au Smic net, soit à 8,92 € pour les périodes d’emploi débutant à compter du 1er janvier 2023.

À noter : cette indemnité minimale s’applique également pour les salariés à temps partiel. En revanche, elle ne concerne pas les salariés rémunérés en pourcentage du Smic (les apprentis, par exemple).

De leur côté, les employeurs perçoivent de l’État, pour chaque heure d’activité partielle, une allocation égale à 36 % de la rémunération horaire brute de leurs salariés (prise en compte dans la limite de 4,5 Smic). Une allocation qui ne peut être inférieure à 8,03 € pour les périodes d’emploi débutant à compter du 1er janvier 2023.

À savoir : dans le cadre de l’APLD, les employeurs ont droit à une allocation, égale à 60 % de la rémunération horaire brute de leurs salariés, dont le montant minimal est fixé à 8,92 € pour les périodes d’emploi débutant à compter du 1er janvier 2023. Ce même montant s’applique à l’allocation versée aux employeurs au titre de l’activité partielle des salariés vulnérables au Covid-19.

La fin de l’activité partielle pour les salariés vulnérables

Depuis le 1er mai 2020, les salariés présentant un risque avéré de développer une forme grave d’infection au Covid-19 (« salariés vulnérables ») peuvent demander à leur employeur d’être placés en activité partielle.

Sont notamment concernés les salariées au 3e trimestre de grossesse, les salariés d’au moins 65 ans ainsi que les salariés atteints d’une affection grave (antécédents cardiovasculaires, diabète non équilibré ou présentant des complications, insuffisance rénale chronique sévère, cancer évolutif sous traitement, obésité…) dès lors :
– qu’ils sont affectés à un poste de travail susceptible de les exposer à de fortes densités virales ;
– et qu’ils ne peuvent ni télétravailler à temps plein, ni bénéficier des mesures de protection renforcées sur leur lieu de travail (isolement du poste de travail du salarié, respect de gestes barrières renforcés, adaptation des horaires d’arrivée et de départ du salarié afin d’éviter les heures d’affluence…).

Cette possibilité de placer en activité partielle les salariés vulnérables prend fin au 1er février 2023.

APLD : un bilan plus complet

Tous les 6 mois, les employeurs qui bénéficient de l’APLD doivent en vue de renouveler leur autorisation, adresser à la Dreets un bilan portant notamment sur le respect des engagements en matière d’emploi et de formation professionnelle, accompagné d’un diagnostic de la situation économique et des perspectives d’activité de l’entreprise.

Pour les autorisations d’APLD portant sur une période dont le début est fixé à compter du 1er février 2023, ce bilan doit également porter sur le respect de la réduction maximale de l’horaire de travail.

Rappel : dans le cadre de l’APLD, la réduction de l’horaire de travail des salariés ne peut pas être supérieure à 40 % (50 % à titre exceptionnel) de la durée légale de travail.Décret n° 2022-1665 du 27 décembre 2022, JO du 28 Décret n° 2022-1632 du 22 décembre 2022, JO du 24Article publié le  – ©  Les Echos Publishing – 2022 – Réf : 512193